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Random, création 2026
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RANDOM, le carnet de création

n° 1 - janvier 25


Cette semaine, nous étions à La Manivelle Théâtre (59) autour d'un premier labo de recherches autour de Random. Démarrer une création, c’est toujours un moment plein d’enthousiasme. C’est un nouveau départ.

Un nouveau départ collectif, basé sur des rencontres. Pour cette création j’ai choisi de m’entourer de Clémence Weill, autrice, et d’Olivier Lautem, ingénieur du son. Ensemble nous partageons le goût de la précision, de la recherche et l’envie de défendre un spectacle vivant militant et joyeux.

Un nouveau départ dans l’écriture et dans la forme. Ce projet, c’est l’occasion d’approfondir une démarche dans laquelle je me place depuis plusieurs années, celle de proposer des formes originales pensées pour l’espace public. Creuser davantage l’idée d’une véritable expérience pour les spectateur·ice·s en déplaçant les codes de la représentation.

Enfin, c’est un nouveau départ personnel puisque Random sera la première création de Grand Brasier, dont j’assure la direction artistique, et qui est la juste continuité du travail que j’ai mené au sein de la compagnie dans l’arbre pendant plus de 14 ans.


Random

Depuis plusieurs années, je m’intéresse à l’espace non dédié. J’ai tourné plusieurs spectacles hors-les-murs (Souliers de sable avec La Manivelle Théâtre, Les présomptions avec Le Printemps du Machiniste, Tout est Chamboulé avec la Compagnie En Attendant, …) et j’ai trouvé ça passionnant parce que ça crée un rapport différent entre le public, les artistes et l’œuvre.

Mais jouer en espace non dédié ne signifie pas réinvestir l’espace public. Par là, j’entends que l’écriture n’est pas pensée pour faire vibrer cet espace, lui donner un sens dramaturgique. Pour Like me (la compagnie dans l’arbre), nous avions conçu un texte à partir des piscines en s’appuyant à la fois sur leurs structures et sur les imaginaires qu’elles ouvrent en chacun·e de nous.

Avec Random, j’ai envie d’aller plus loin dans le rapport espace public/expérience du spectateur. Pendant cette résidence, nous nous sommes demandé en quoi le lieu de représentation nourrit l’écriture et inversement ? Au théâtre on fabrique une boîte noire pour neutraliser l’espace et en amener un autre. Ici c’est le procédé inverse. Se laisser traverser et charger par l’espace dans lequel on joue. Au fil des jours, en brassant ces questions, l’ossature du texte est arrivée. Nous allons transposer notre volonté d’aller à la rencontre du public dans son quotidien. Ainsi, le texte raconte une équipe scientifique qui vient à la rencontre du public dans son propre espace pour l’inviter à expérimenter un nouveau concept, celui d’écouter la pensée des interprètes. Cette piste nous réjouit car c’est un autre contrat tacite entre les comédien·ne·s et les spectateur·ice·s. On ne demande pas au public de s’oublier de façon neutre dans l’écrin noir d’une salle de spectacle, mais bien de s’impliquer activement dans la représentation au sein d’un espace qui lui est familier. Et redonner à cet espace son caractère de lieu de vie, de partage et de discussions.


Random

L’enjeu de cette résidence portait donc principalement sur l’écriture. Au départ j’avais des envies formelles (celle d’une forme au casque dans laquelle il faudrait faire le choix de qui on écoute, celle du bifrontal qui questionne l’impact sur nos décisions). Pour donner de la consistance à notre propos, j’ai donc proposé à deux interprètes (Lyly Chartiez-Mignauw et Olivier Brabant) de rejoindre ponctuellement l’équipe pour tester le dispositif. J’avais envie qu’on éprouve ensemble tout le potentiel de ce dispositif avant que Clémence ne se lance dans l’écriture, histoire d’être au plus près d’une écriture sur mesure. Entre chaque impro, nous avons pris le temps d’échanger sur nos ressentis pour questionner l’intérêt de ce dispositif. Finalement, nous avons réalisé, bien au-delà de l’aspect ludique, qu’il y a pas mal de fils à tirer sur le plan dramaturgique et scénique.

Notre prochaine étape a lieu en avril, en immersion dans un collège du Pas-de-Calais, pour préciser, au contact des adolescent·e·s, le parcours de vie que chaque personnage va raconter.


Random

Lyly et Olivier ont accepté de se prêter au jeu de l’expérimentation, et témoignent de leur ressenti.

Ce fut un réel plaisir de participer à ce temps de recherche collective. Plonger dans l’inconnu sans pression, avec simplicité et confiance.
Expérience étrange de se savoir écouter (ou pas), d’être au plus près des spectateur·ice·s aussi bien dans l’espace que dans l’écoute. Être dans une « multitude d’intimités » avec chacun·e·s. Le sentiment de deux mondes (le plateau et l’écoute) qui se croisent, se séparent, se rejoignent.

Olivier

Je me suis retrouvée à expérimenter cet étrange processus de jouer et d’observer en temps réel qui du public m’écoutait. Le fait de moduler le jeu avec la possibilité de susurrer permet une adresse délicate et individuelle, tout en observant les choix d’écoute en temps réel et modulable à l’envi.
En étant au plateau, je sais qui me regarde dans les yeux et change son canal d’écoute, tout en restant les yeux rivés sur moi. J’ai une information de plus que sur d’autres spectacles. Je matérialise l’écoute des personnes assises devant moi.
Ce processus de travail est pour moi totalement inédit et me plonge dans une grande jubilation et une exigence accrue : être dans une immense précision de l’adresse. C’est une étrange sensation de proche et de lointain partagée avec chaque personne présente dans la salle.

Lyly



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